Moi, mon rêve...
C'est fou ce qu'un brin d'herbe à peu près vert, les cris d'une corneille, la photo d'une Vespa peuvent m'émouvoir. La Vespa, surtout.
Adolescente, j'aurais fait des bassesses pour un engin de ce genre. Plus tard, j'enviai Madeleine qui venait aux répétitions en scooter. L'allure qu'elle avait, Madeleine, quand elle montait sur sa Vespa ! Le monde lui appartenait, elle était belle, fantasque, libre. J'image que c'est son rapport privilégié avec le temps et l'espace que j'enviais : sur sa Vespa, Madeleine allait plus vite et plus loin que moi.
J'ai donné mon vélo à ma fille. Je n'aime pas rouler en ville et je n'ai pas d'auto à laquelle l'accrocher. Dans son livre Les territoires de l'excès, mon amie Francine Déry évoque une photo noir et blanc de Sieff. Trois phrases, guère plus. Cela suffit pour que remontent en moi une vieille envie et quelque chose, plus difficile à cerner, que j'appelle mon rêve.
"La bicyclette. Dans un cadre métallique pendu au mur, l'oeil voyage véhiculé par une photographie prise il y a quelque vingt ans. Sur un étroit chemin de campagne, une jeune fille tenant le guidon d'une bicyclette. On le devine au relent du sourire, la campagne était verte." (Francine Déry, Les territoires de l'excès, Éditions du Noroît, 1990)
Francine, à Florence, en 1991